J’ouvris soudain les yeux, mettant fin au cauchemar qui me terrorisait depuis des mois et des mois. Sauf que cette fois-ci, ce n’était pas le même. Il était beaucoup plus violent, et ce n’était pas les mêmes personnes. C’était les membres de ma chambre. Enfin, les deux filles de ma chambre, parce que le garçon, parce qu’il s’agissait d’un garçon à ce que j’en avais compris, était mort depuis déjà un petit moment. Quand elles m’avaient montré la photo du garçon, je l’avais aussitôt reconnu, et avait dû, presque bien malgré moi, avouer qu’il était plutôt mignon. Même pour un mort. C’était mal de penser comme ça, c’est vrai, mais moi, et je l’avoue bien volontiers, je suis un peu perturbée, et la mort, je ne la crains pas. Je lui offre même des gens. Hier encore, une de mes victimes la rejoints sans faire trop d’histoire. Non, je n’aime pas spécialement tuer des gens, mais c’est mon boulot, et il faut que je le garde si je veux avoir de quoi manger, et de quoi loger. Je peux dormir dans la forêt, ça c’est pas un problème, je peux aussi manger là-bas aussi, mais ça voudrait dire qu’il faudrait que je me fasse passer pour morte, et donc que je n’ai plus aucun contact avec le peu d’amis que j’ai pu me faire, et avec les filles de la chambre, que je commence juste à apprécier.

J’étouffe dans cette chambre, il faut que je sorte. Je m’enfuis donc et me jette sur la porte. En évitant de faire trop de bruit bien sûr… comme je le fais si bien… Je m’assoie sur le rebord de la fenêtre du couloir après avoir doucement fermé la porte. J’inspire de grandes goulées d’air, histoire de me changer les idées, d’essayer d’effacer les images horribles qui défilent devant mes yeux. Je pense à l’image que je dois être en train de montrer de moi : un corps limite squelettique, blanc comme un lavabo, des yeux vairons un peu vitreux… pas belle allure en somme. Et puis, on ne peut pas dire que j’ai fait quoi que ce soit pour cacher ce corps en mauvaise santé, vu que ce que je porte en pyjama, c’est juste une chemise noire, qui contraste avec ma peau blanche, et une petite culotte, toute aussi noire.

Sentant mes mains trembler un peu, je m’attache les cheveux en un chignon à peu près potable, et allume une cigarette pour me calmer. Il n’y a que comme ça que j’arrive à me détendre. Un peu. Mais bon, c’est déjà ça j’ai envie de dire. Il faut se dire que c’est mieux que quand je prenais de la drogue sans chercher à savoir quelles en seraient les conséquences sur mon organisme. J’en pais le prix aujourd’hui : je n’arrive pas à prendre du poids, j’ai la peau aussi blanche qu’un cachet d’Aspirine et des cernes que j’essai de cacher avec un maquillage de raton-laveur. J’ai au moins eu la chance de ne pas avoir eu d’infection avec mes piercings. Parce que ce n’était pas un bon perceur qui me les avait fait et c’était pendant une soirée, donc au milieu de la drogue, de la sueur, de la musique… pas un milieu génial quoi… mais bon, ce n’est pas grave, puisque je n’en suis pas morte.

Écrasant ma cigarette, j’appuie ma tête contre la vitre, laissant l’air frais me caresser le visage. Qu’est-ce que je faire de moi, de ma vie… Elle est fichue de toute manière. La seule manière que j’aurais de m’en sortir serait de tuer mon patron, mais après qu’il ait fait un papier comme quoi je lui succéderais. Sans ce papier, les hommes de mon patron pourraient faire ce qu’ils voudraient de moi, et pourraient aussi partir de la bande, juste parce que j’en aurais repris le contrôle sans avoir les droits. C’est dur, la vie de mercenaire. Il faut se faire une réputation, et c’est tout un baratin pour reprendre une bande. Surtout que la notre est très puissante, donc si je ne la maitrise pas bien, d’autres en profiteraient pour nous faire exploser de l’intérieur, et ce serait la mort.

*Tiens, un bruit*

Je me retourne, sentant un changement dans l’air, et le bruit étouffé des chaussures sur l’épais tapis du couloir. Je suis vue. C’est obligé. Je ne suis pas si près de ma chambre que ça, mais j’ai la peau qui brille presque tellement elle est blanche, et puis bon, tout est presque noir dans le couloir, il n’y a pas de Lune et les étoiles n’émettent qu’un léger scintillement.

*Oh shit ! Je suis vraiment dans la m*rde si c’est un pion…*

Oui, parce que je ne suis pas censée être autorisée d’une, à sortir de ma chambre en pleine nuit, de deux, squatter la fenêtre, donc être aussi près du vide, et de trois, de fumer dans l’établissement. Il ne me reste plus qu’à croiser les doigts pour que ce ne soit qu’un élève qui est partit faire la fête et qui revient en douce. Je lâche un discret soupir quand j’aperçois les cheveux roux d’un… grand – tout le monde est grand pour moi – mec, qui n’est visiblement pas un pion. Qui ressemble d’ailleurs vaguement au garçon de la photo… non, ce n’est pas possible, ça ne peut pas être lui, il est mort depuis perpette, et la dernière fois que je l’ai croisé, c'est-à-dire, depuis plus de deux ou trois mois, il n’avait pas cette tête de torturé, et il n’était pas aussi maigre… Qui ça pouvait bien être ? Très bonne question, à laquelle je pourrais répondre très rapidement, parce qu’il avait l’air quand même très pressé.

« Qui es-tu ? »

Tant qu’à faire, puisque j’étais déjà repérée, autant engager la conversation avec l’inconnu. En plus, il était mignon, donc peut-être que je pourrais le noter dans mon carnet de mes futures « conquêtes ». Peut-être je dis bien, parce que s’il a un caractère de chien, c’est même pas la peine. Premier test en quelque sorte : ne pas envoyer bouler mon manque de tact. Je suis comme ça, et des fois, ça peut faire peur. Mais c’est moi, et ‘faut pas s’étonner que je fasse des gaffes, ou que je sois d’une franchise déconcertante.


P.S. : Je risque de repasser à la 3eme personne pour la suite du rp, c'était juste un test ^^

Lucia n'eut pas à attendre longtemps sa réponse, parce que le garçon lui répondit presque aussitôt.

« Shin. Shin Jeevas. Je crois qu’on s’est déjà croisé. Avant. Après, il se peut que tu m’aies oublié vu que ça fait un mois que je suis sensé être mort… »

La demoiselle n'eut pas le temps de dire quoi que ce soit que le dénommé Shin enchaîna :

« Dis… T’aurais pas une cigarette à me dépanner des fois ? Avec le briquet qui va avec ? J’ai plus rien sur moi, et je pense pas qu’ils aient gardé ma chambre en l’état après mon … "Décès". J’espère juste qu’ils ont pas trouvé ma réserve, j’aimerais éviter d’avoir à rappeler mon dealer tout de suite… »

Alors comme ça lui aussi trainait un peu dans l'illégalité ? Il allait être content alors...

"Moi c'est Lucia, Lucia Van Orn. Oui, je t'ai déjà croisé, et je ne t'ai pas oublié... même si je suis un peu surprise de voir qu'en fait tu n'es pas mort."

Elle lâcha un petit rire en donnant une cigarette à Shin, avec son briquet. De près, il était encore plus mignon que sur la photo, et plus blanc aussi, et plus maigre. Donc, elle avait bien vu, c'était... lui...

"Et si tu as besoin de quoi que ce soit, s'ils t'ont pris ta réserve, je peux t'en passer un peu si tu veux"

Elle lui lança un grand sourire. Cela faisait longtemps qu'elle n'avait pas sourit comme ça, au point que ses canines, assez longues, soient dévoilées. C'était plus que rare, et il devait s'en sentir flatter ! Non je rigole... Quoique... HUM HUM.

Lucia, ne pouvant pas résister, s'alluma aussi une clope, dès qu'elle eut récupéré son briquet. C'était un vieux tic, dont elle n'arrive pas à se débarrasser. Bon, de toutes façons, c'est pas grave, sa vie est foutue, elle ne pourra plus rien en faire. Elle finira sa vie à 25 ans, comme dealeuse... Trêves d'idée pessimistes ! La demoiselle observa Shin en s'adossant contre la rambarde.

"Si on se fait chopper, on est mal..."

Lâcha la petite Scorpio. Elle savait qu'elle risquait gros, mais elle savait toujours s'en sortir, et pour le coup, elle aiderait même Shin, parce qu'il était mignon, et qu'il était sympa. A première vue du moins. Elle soupira en s'étirant, la cigarette coincée entre ses lèvres. Cela faisait maintenant un petit moment qu'elle était dans la même position, et elle commençait à rouiller. Et elle aimait pas rouiller. C'était pas bon. Pour si elle devait fuir... Mais apparemment, il n'y avait pas de pion qui passait la nuit. Elle n'était jamais restée toute une nuit entière, mais assez de temps pour savoir que personne ne passerait. Pas avant plusieurs heures en tout cas.

Elle écrasa pour la seconde fois sa cigarette, et jeta le mégot par la fenêtre d'une pichenette. Le sommeil commençait peu à peu à la gagner, mais d'une, elle ne voulait pas laisser le garçon seul, même s'il était sensé être dans la même chambre qu'elle - chose qu'elle lui avait bien évidemment cachée -, de deux, elle savait que le sommeil fuirait à la seconde où elle mettrait un pied dans son lit... pauvre d'elle, rendue légèrement insomniaque à cause de la drogue...